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Xan de l'Ours
30 avril 2008

JOURNÉE "OURS" POUR ASTOBELARRA

A l’occasion de la venue de l’auteur Marc Large en Soule, l’association Astobelarra organisait samedi après-midi dernier une discussion autour de "l’ours en Pays Basque". Un forum très intéressant et instructif qui aurait mérité le plein de public...

Par E.H.BOYER

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Tous d’accord : il y a bien longtemps que l’on n’a plus vu l’ours (vivant) en Pays Basque. Combien de temps encore en Béarn, et sur toute la chaîne des Pyrénées ?

Voulant donner une suite à la venue de l’auteur Marc Large en Soule, qui présentait le matin même son nouveau livre « Xan de l’ours » (éd. Cairn) au magasin des produits régionaux à Mauléon, l’association « Astobelarra, le grand chardon » qui édite deux collections dont une bilingue basque/français a organisé l’après-midi une discussion sur le thème de l’ours en Pays Basque, au centre Multiservices. Pour ce faire, elle avait contacté plusieurs intervenants, dont Marc Large, qui a positionné son discours sur le côté historique de la cohabitation nomme/ours ; ainsi que le Vert du Béarn André Cazetien, lui aussi auteur de plusieurs ouvrages traitant de la problématique ursine. Au duo d’écrivains avait été ajouté la présence du chanteur souletin Jean-Michel Bedaxagar, qui s’est chargé, quant à lui, de situer la place de l’ours dans le chant traditionnel basque.
Une initiative très intéressante et enrichissante (qui sera certainement reconduite sous une autre forme et à un autre horaire), même si le débat était relativement orienté, et que le public, peu nombreux, était tout acquis à la cause...

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Depuis les protobasques...

Selon Marc Large, l’ours a toujours bénéficié d’une espèce d’anthropomorphisme. Les liens avec le plus grand fauve d’Europe remonteraient au temps des néanderthaliens. On ne lui vouait pas vraiment une haine franche, mais plutôt une certaine fascination. Les protobasques le considéraient comme leur ancêtre, tandis que certaines grandes familles pensaient avoir des racines ursines. On retrouve l’ours dans les noms des villes d’Europe (Bern...), dans certains prénoms (Bernard...). Et le dacquois, qui fait partie de l’association « ADET pays de l’ours » de s’interroger : « Sommes-nous la dernière génération à pouvoir attester de la présence de l’ours en Pyrénées, alors que le plantigrade était là avant nous ? Sommes-nous à même de pouvoir donner des leçons aux africains qui déciment leurs éléphants, alors que nous mêmes galérons avec quatre pauvres ours qui divaguent entre Aspe et Ossau ? » Marc Large ne peut s’empêcher de faire le parallèle entre la protection de l’ours et celle de la culture et de la langue basques. Pour Marc large, il ne fait aucun doute qu’il y a une urgence à sauver l’ours. « La cohabitation est possible », assure t-il.
Pour lui, il s’agit avant tout de pédagogie. Et de rappeler que la peluche la plus vendue au monde est le « nounours », qui symbolise chez l’enfant l’amour maternel, le confort et la sécurité. « Comment expliquer qu’à l’âge adulte, l’ours puisse devenir cet être haï ? »

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Les intervenants de gauche à droite : André Cazetien, Marc Large et Jean-Michel Bedaxagar.

Respect de la biodiversité !

Pour résumer, la biodiversité, c’est la chaîne naturelle qui permet la vie de toutes les espèces de la planète. André Cazetien le clame haut et fort : « On ne peut pas accepter que l’homme fasse disparaître une espèce comme l’ours (ou la baleine, l’éléphant, le tigre du Bengale, le requin, etc.). C’est l’homme qui met la biodiversité en danger du fait de ses activités, et de son statut de super prédateur. C’est contre cet homme là, qui a inventé le fusil, qui s’en sert pour tuer les animaux et d’autres hommes que nous devons agir ! » Pour le maire honoraire de Mourenx, militant Vert au Béarn, nous devons veiller à ce que soit maintenu un respect universel, non restreint à la protection du monde animal. Faisant le lien avec les OGM, la voie rapide de la vallée d’Aspe, ou se posant la question de l’utilité relative de l’agro éthanol, qui sont pour lui autant de problèmes inséparables de celui de l’ours, il prône une vision plus globale de la planète : « Ne cherchons pas seulement à défendre notre petit lopin pyrénéen. Où donc iront les bergers lorsqu’il fera 45° dans les estives ? Que restera t-il du pastoralisme ? Oui nous sommes pour le renforcement de la population ursine. Mais c’est parce que nous sommes pour l’ours, que nous sommes pour l’homme ! »
Mais celui qui, lors du dernier tour de France, a pu lire peint en blanc sur le goudron de Laruns « ours non ! Cazetien, non ! » reste philosophe : « On ne va pas convaincre les gens en leur disant que la nature est belle. Il faut aussi améliorer les conditions de vie des valléens et des bergers. C’est à ce prix qu’on réhabilitera le dialogue ! »

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L’ours, c’est toute une culture...

Depuis que l’homme est l’homme, en Soule, on parle de l’ours, des bergers et des moutons à travers le chant souletin, et les histoires qu’on se raconte de père en fils. Jean-Michel Bedaxagar raconte : « Autrefois, sur les estives, on comptait 5 à 6 bergers pour un troupeau de 600 têtes. Aujourd’hui, il n’en reste qu’un pour garder le même cheptel ! » Un chant dit que le berger pouvait partir tranquille à la montagne, comme s’il allait en vacances, puisqu’il avait toujours un frère, un oncle ou un cousin pour rester à la ferme et s’occuper des foins et regains. Aujourd’hui, l’agriculteur est seul pour assurer la traite, la fabrication et les fenaisons. Un autre chant parle de tribut à payer à la montagne et à ses habitants sauvages. C’était vrai au XIXième siècle. Les bergers devaient parquer leurs brebis le soir, car il n’était pas rare que l’ours, ou le loup viennent prélever leurs quotas. Mais c’était chose acceptée et naturelle, du moins autant que les dégâts causés par la foudre ou les chiens sauvages. « Alors pourquoi aujourd’hui, à Larrau et Sainte Engrâce a t-on l’ours en haine, alors qu’il a disparu de ces terres ? », s’interroge le chantre de la soule... Il faut croire que c’est justement parce qu’on ne l’y voit pas assez souvent !
Jean-Mixel Bedaxagar a conclu en beauté son intervention en entonnant « la morsure de l’ours », un chant tout en métaphore sur un plantigrade mordant qui camoufle l’histoire d’une jeune bourgeoise mise enceinte par le curé Haritchabalet de Sainte-Engrâce !

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En conclusion...

Marc Large est revenu sur l’ours des cavernes, contemporain de l’ours brun des Pyrénées. "Les experts s’accordent à dire que son espèce s’est éteinte du fait de la chasse humaine..." Comme quoi l’histoire aurait tendance à se répéter...
En parallèle à son roman "Xan de l’ours", L’auteur a raconté le sombre fait-divers de "la dame de Vicdessos", datant de 1809, et qui s’est déroulé en Ariège. Une jeune femme qui vivait à l’état sauvage a été capturée, puis internée à Foix où elle s’est laissée mourir... Lorsque la fiction rejoint la réalité...
Prenant la balle au bond, Michèle, dans le public, a parlé d’anthropocentrisme. "L’homme a toujours eu tendance à essayer de plier la nature a ses besoins, de la mettre à sa disposition. Jusqu’à sa totale disparition ? Nous faisons partie d’un tout. Si l’on enlève une partie de ce tout, c’est tout le reste qui commence à décliner..."
Enfin, André Cazetien, doyen de cette rencontre autour de l’ours en Pays Basque, a conclu sur un message d’espoir : "On vient de faire de l’ours ’un familier’. Il faudrait continuer en ce sens, montrer que l’ours n’est pas dangereux." Et cela, les deux auteurs -qui ont rencontré le plantigrade en chair et en poils en pleine nature- peuvent l’attester !

E. H. Boyer, journaliste pour Euskobizia

Jean-Michel Bedaxagar a évoqué l’ours en Pays Basque au travers de la poésie et du chant souletin.

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